La pornographie vendue par les enfants mineurs


Ils me trouvent sur une terrasse où j’échange avec un ami. Ils s’approchent de nous et nous exhibent quelques disques qu’ils vendent. « J’ai la dernière saison de 24heures Chrono! Il y a aussi la série de Frijolito et de Paloma », me lance le plus âgé. Je lui réponds que je ne suis pas très intéressé. Ils s’en vont, puis le plus jeune revient encore quelques minutes plus tard. Il me dit à l’oreille : « J’ai aussi des films pornographiques. Si ça t’intéresse, je te les donne à 1500 FC chacun ». 

« Ema! », m'exclame-je en dans ma langue maternelle. Je l’observe. Le monsieur qui me parle me parait trop jeune pour me faire une telle proposition. Je me fais très intéressé par son offre. Il me sort une dizaine de films pornographiques avec pochettes bien auréolées. C’est alors que je lui pose des questions sur sa personne. Il me dit qu’il s’appelle Abibou. Il a 13 ans. Il étudie en 6ème  année primaire à l’E.P. CC (Camp Cinéma) dans la Commune de Kadutu. Chaque jour après cours à midi, il fait le porte-à-porte au centre-ville pour vendre des DVDs de films. Et à cet âge, il vend déjà des films pornographiques, comme de nombreux autres jeunes de son âge qui sillonnent la ville avec des CDs. 

Quelle est le rôle de la société devant cette dérive éducationnelle des enfants mineurs? Le processus de déliquescence et de la démission de l’Etat, a entraîné dans son sillage la dégradation de l’éducation des enfants. Au rythme de la croissance démographique dans la ville et du laisser-aller des parents, l’éducation des enfants échappe et connait un développement quantitatif débridé et anarchique. N’est-ce pas que tout système éducatif est d’abord un problème de la société qui l’organise et qui le gère et dont il est à la fois le reflet et la résultante ? Suivons donc de près ces enfants en voie de perdition, sinon nous en serons tous responsables et avec à la tête l’Etat.

Se décharger partout: une bévue devenue naturelle ?


Et voilà ! Encore un garçon BK en train faire paisiblement sa toilette. On n’en parlera jamais assez ! Bukavu ma ville, connue depuis plusieurs années comme la Suisse de l’Afrique, de part sa nature florissante, ses hauteurs et sa sublime beauté, n’est plus qu’une vieille poubelle. Les belles rues résidentielles qui la valorisaient jadis, les hommes et même les femmes, les ont transformées aujourd’hui en véritable dépotoir où tout quidam vient y déposer ses déchets. 

Cette bizarrerie, devenue comme une nature, ne gène plus personne. En cours de route, de plus en plus de gens trouvent normal qu’un camarade se soulage. Et où ? N’importe où, pourvu qu’on libère sa vessie ou son gros intestin ! Et cela au vu et au su des agents de l’ordre et même des autorités provinciales ayant l’hygiène dans leurs attributions. Les enfants de la rue, véritables acteurs de cette besogne, ont transformé plusieurs coins de la ville en zones inaccessibles, seulement par l’odeur. Sur certains murs de la ville, les inscriptions du genre: « Interdit de pisser ici », « Quiconque sera attrapé en train de pisser ici sera puni »,… ne sont que des slogans creux qui, d’ailleurs, ne font que salir les murs qui embellissent encore certaines rues de Bukavu. 

Mais au delà de tout, l’on peut se demander si réellement cette population n’a pas raison d’agir de la sorte ! Dans cette ville où les toilettes publiques sont quasi inexistantes, l’Etat devrait réfléchir par deux fois. Pour construire une latrine publique, cela nécessite-t-il un budget colossal ? La Mairie étant responsable numéro 1 de la ville, ne devrait-elle pas prendre ses responsabilités afin de nous éviter cette monstruosité qui ternit notre image auprès des visiteurs étrangers ?

En attendant les grands changements qu’on nous promet, nous serions fiers si le Maire de la ville initiait une politique de restriction de cet acte. Plusieurs méthodes pourraient ainsi être adoptées : « Un pipi, une pierre ». Seront donc lapidés, tous ceux qui s’aventurent à se décharger en pleine rue dans notre ville. Même la pire des solutions n’est-elle pas la bienvenue pour nous éviter de telles humiliations ?

Le salut au drapeau : source de revenus pour les militaires ?


Ce matin à 7h30 avant d’aller au travail, je fais un petit crochet à l’hôpital CELPA voir un malade interné là depuis deux jours. Je marche rapidement pour retourner vite. Je suis alerté par un autre passant que je vois immobile comme un poteau. Il me crie : « Arrêtes-toi, on risque de te frapper ». Je remarque que tout mon entourage est figé devant le drapeau national qu’un militaire remonte sur un morceau de bois au bureau de la 10ème région militaire. Je m’arrête comme tout le monde. Pas d’hymne national ni de chants patriotiques. Tout se fait comme dans un chœur des muets.

Quelques secondes avant la fin de ce salut au drapeau, un motard distrait roulait encore non loin de là. Il ne s’en rendra compte qu’à la fin. Mission réussie pour les militaires attachés à ce quartier général. Le motard est alors récupéré illico et son jeune client giflé avant de repartir sur un autre taxi-moto.


Au sortir de l’hôpital, j’apprends que la moto du motard a été saisie. Pour la récupérer, le motard est obligé de payer 20 $US d’amende pour avoir été inattentif pendant le salut au drapeau. La 10ème région militaire se transforme ainsi en service taxateur. Un petit butin que les soldats se partageront pour s’acheter des cigarettes et quelques bouteilles de bière. Vive les distraits pendant le salut au drapeau. Un business qui roule !

Les convoyeurs des bus de transport : Aucun respect pour les clients !



Ce dimanche matin, je dois être à Kadutu à 8h00. C’est une urgence ! Je n’ai pas de sous dans ma poche. La seule monnaie dont je peux me vanter ce sont quelques billets de 100 Francs congolais qui traînaient encore la veille dans mes poches. J’en réunis quatre, assez suffisants pour une course dans un bus. Aussitôt, je me plante au parking de Nyawera. Il est 7h30’. J’entre dans un minibus. Je suis encore seul dedans. Le convoyeur hèle passivement les clients qui sont rares. Il n’y en a presque pas d’ailleurs. Les peu de clients qui arrivent, préfèrent prendre les taxis-voitures ou motos qui sont vite pleins et expéditifs. Moi par contre, je ne peux me permettre ce luxe à cet instant. Ma poche est indigente. Je patiente.

Dans ce minibus de 18 places, les clients arrivent peu à peu. Nous sommes deux, trois, puis cinq clients. A 7h50', je meurs déjà d’impatience d'arriver à mon rendez-vous de 8h00. En plus, je remarque que le convoyeur ne fournit pas suffisamment d’effort pour mobiliser les clients. Mais peu à peu, les clients affluent. Nous sommes déjà 17 et il est 8h20'. Je suis très en retard.

Le chauffeur qui doit nous conduire ne veut pas quitter le parking tant que la dernière place n’est pas occupée. Eh bien, il faut encore attendre ! Pendant ce temps, l’homme avec qui j’ai rendez-vous à Kadutu, s’impatiente. Il a un programme chargé. Il me fait des appels téléphoniques et d’incessants "bips". Pour moi, l’heure est grave ! Je suis fou furieux de cette longue attente. Je négocie le départ avec le chauffeur du bus mais sans succès. « Je ne peux pas quitter tant que le bus n’est pas plein », me lance-t-il sèchement. On attend encore!

La goutte d'eau qui déborda le vase 

Impatients d’attendre, trois clients quittent ce bus et prennent des taxis. Je suis alors troublé. C’est là qu’un des clients demande gentiment au convoyeur: « Maintenant que trois clients viennent de quitter, on doit encore attendre combien de temps ? »
Le convoyeur, nous regardant tous dans les yeux, lance avec aisance : « Que celui qui veut quitter ce bus, le quitte ! Vous pensez que je peux manquer des clients ? On ne quittera pas ce parking tant que ce bus n’est pas plein. Et celui qui veut partir qu’il s’en aille ! Sots et stupides que vous êtes ! Et faites ce que vous voulez, vous ne m’emmènerez nulle part!» 

Les propos du convoyeur laissent tout le monde de marbre. Certains de ceux qui sont avec nous quittent aussitôt ce bus. D’autres, insensibles à ces propos, attendent toujours le départ. Moi par contre, je suis furieux d’être traité de sot par un inconnu que je n’ai rien fait et en même temps je suis embarrassé... Ma petite sagesse a tout simplement épargné cet impoli de convoyeur à avoir un visage défiguré ce matin là..

Jusqu’à quand continuerons-nous à être victimes des propos malsains de la part des convoyeurs des bus de transport ? A qui advient la faute pour déguster si gratuitement de telles humiliations ? A l’Etat ? Aux propriétaires de ces bus ?  Peut-être oui ! Eux qui embauchent à tout coin de rue des troubadours grossiers, malappris et mal élevés.

Il a fallu attendre encore 20 minutes avant que le chauffeur décide enfin de quitter le parking, avec seulement quelques clients. J’arrive avec une heure de retard à mon rendez-vous. Et dire que les Congolais ne respectent pas le temps ! Ma journée dominicale venait ainsi d’être gâchée par un convoyeur de bus !

L'Hôtel du gouvernement provincial en feu!

 

Il est 23h48’ à Bukavu. Trois techniciens de la RTNC restés au studio après la fin des programmes trente minutes plus tôt, sont déjà en plein sommeil.  Indisposés par la chaleur et alertés par les cris des sentinelles et autres policiers de garde, ils se lèvent et du coup, c’est le sauve-qui-peut ! 

L’Hôtel des Postes de Bukavu, devenue Hôtel du gouvernement provincial, est en feu. Tout le quartier est alors alerté. Les appels téléphoniques se font dans tous les sens pour faire appel aux services de secours. Pendant ce temps, l’incendie qui serait parti du studio de la RTNC, gagne un  nouveau local à chaque quart d’heure. 

Les émetteurs et studios télé et radio de la RTNC Bukavu, le bureau du PRCG (Projet de Renforcement des Capacités en Gouvernance) ainsi que les installations des 4 ministères provinciaux : Enseignement, Agriculture, Santé et Justice sont tous consumés par le feu. Plusieurs biens matériels importants dont les archives, aussi bien de ces ministères que de la RTNC sont réduites en poussière.  L’histoire vient ainsi de partir en fumée!

Grâce au camion anti-incendie de la Pharmakina avec l’appui en eau de la Monusco, arrivés sur lieu deux heures plus tard, le feu est maitrisé. Ils épargnent ainsi la fournaise à deux autres ministères, au secrétariat exécutif du gouvernement provincial et au bureau de la CENI (Commission Électorale Nationale Indépendante) Sud-Kivu. 

Jusqu’à ce samedi matin, l’origine du feu reste inconnue. Mais certains témoins que je rencontre sur le lieu déclarent que: « le feu est parti des câbles vétustes externes qui entourent le bâtiment, côté RTNC. » 

Il y a plus d’une année, la grande Poste de Bukavu recevait de la Banque Mondiale un appui financier de plus de 400.000$US pour sa réhabilitation. Les travaux étaient en cours de finissage. Mais aujourd’hui, tout doit reprendre à zéro.